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  L'inversion des pouvoirs clients-fournisseurs
Dossier "Le Directeur" du 30/10 au 12/11 2000 par Béatrice Roux

  force de se consacrer à l´amélioration de leurs produits et de leur fonctionnement interne, les entreprises avaient fini par perdre de vue la composante primordiale de leur fonds de commerce : leurs clients...

On assiste depuis peu à un retour de balancier favorisé par l´explosion de l´Internet en tant qu´outil de partage des connaissances et des informations; les entreprises se tournent aujourd'hui avec passion et ferveur vers leurs clients.

L´émergence du concept de gestion de la relation client est le résultat d´une lente évolution de la mentalité des entreprises. Ainsi, depuis le début des années 90, le marché connaît une profonde modification avec l´inversion du marketing : passage d´une orientation produit à une orientation client. Les années 90 marquent le début de l´ère du client. Les bases de données client se multiplient. L´essor du marketing direct permet de mettre en avant les avantages de la relation directe. Les canaux d´accès et d´information prolifèrent.

Mais c´est sans aucun doute les années 2000 qui marqueront l´intensification de cette tendance client avec l´émergence du concept de marketing one to one. Une offre spécifique pour chaque client est désormais possible grâce à l´avènement de l´Internet. Demain, grâce à des technologies comme la téléphonie mobile, il sera possible de dialoguer avec le client où qu´il se trouve. Les entreprises, quels que soient leurs secteurs d´activité, concentreront leurs efforts sur le service et la gestion de la relation client.

L´accélération de la concurrence, la pression sur les marges, l´émancipation de consommateurs de plus en plus exigeants et la multiplication des canaux de relation avec les clients imposent donc aux entreprises de passer d´une gestion de masse à une relation individualisée avec le Client.

Le Client est aujourd´hui la plus sous-exploitée des ressources de l´entreprise.

Or, les entreprises disposent, dans leurs systèmes d´information, d´une multitude de données sur leurs Clients qui constituent un gisement extraordinaire de connaissances. L´évolution des technologies de l´information rend aujourd´hui possible et rentable l´exploitation de ce gisement pour augmenter la valeur globale du Client.

Les technologies du CRM permettent de classer et d´utiliser les données pour apporter une aide à la décision souvent capitale pour l´entreprise : mieux connaître le Client, choisir les meilleures techniques de recrutement, optimiser l´allocation des ressources marketing selon les Clients, réduire les risques de crédit, augmnter les ventes croisées, établir un dialogue individualisé, anticiper l´attrition des Clients… Le potentiel de profit pour l´entreprise est énorme.

Derrière les trois lettres CRM se cachent plusieurs définitions : Continuous Relationship Marketing, Continuous Relationship Management ou Customer Relationship Management, définition la plus « classique ».

Profiter de ces technologies pour améliorer la connaissance des Clients, c´est optimiser les investissements pour vendre plus et mieux. L´optimisation du Capital Client s´inscrit dans un processus d´exploitation et d´analyse des données qui suit un cheminement bien précis. Collecter, structurer, enrichir, visualiser, analyser, industrialiser et redistribuer l´information sont autant d´étapes incontournables pour maîtriser et développer la connaissance des Clients.

Les différents chiffres des cabinets d´études convergent pour prédire un avenir radieux au marché du CRM. Sur les 300 groupes européens ou américains d´au moins 500 salariés interrogés par IDC et Cap Gemini en 1999, 65 % se déclaraient sensibilisés aux enjeux de la relation client. Toutefois, les estimations donnent des écarts importants qui traduisent la difficulté de cerner le marché du CRM. En effet, selon les cabinets consultés, le cercle des applications retenues sera plus ou moins restreint.

Les prévisions du Méta Group et d´AMR Research prévoient, entre 1997 et 2002, une multiplication par dix du marché du CRM, qui devrait atteindre les 11 milliards d´euros en 2002. AMR précise que les applications d´automatisation de la force de vente représenteront 60 % de ce marché.

Ce marché devrait représenter 50 % du budget de développement informatique des grands groupes à partir de l´an 2000. La croissance a été freinée par les priorités incontournables de l´euro et de l´an 2000, mais, aujourd´hui, les projets de gestion de la relation client se traduiront par une croissance du marché estimée entre 30 et 60 % par an selon les périmètres considérés par les cabinets d´étude.

Les ERP (progiciels de gestion intégrés) ont défrayé la chronique dans le milieu des années 90 par leurs performances. À l'aube de l'an 2000, nombre d'entreprises ont pris en main leur informatique de gestion et choisi de s'appuyer sur des progiciels de type Oracle Applications, SAP, Baan ou Peoplesoft. Les éditeurs d'ERP ont bénéficié d'une croissance qui a émerveillé le monde entier dans les années 90. Le marché de la relation client est perçu aujourd'hui par les cabinets d´études comme le nouveau marché des ERP.

Les sociétés intervenant sur le marché du CRM se répartissent en cinq grandes catégories.

· Conseils en stratégie (McKinsey, Bain, AT Kearney, Braxton, Mercer, …) : en tant que généralistes, ils intègrent généralement une « pratique » sur le customer management. Leur intervention se situe en général en amont dans la définition d´une stratégie de gestion de la relation client.

· Big Five (Andersen Consulting, Coopers B&D, KPMG CSC, …) : ces cabinets sont actifs tant sur le conseil que sur l´ingénierie. Ils ont l´avantage de la taille pour supporter des gros projets.

· SSII Intégrateurs (SEMA, Cap, …) : généralistes de l´informatique, ils ont une offre d´intégrateurs.

· SSII Spécialisées (Europstat, Valoris, …) : ces sociétés intègrent généralement une offre de CRM essentiellement axée sur l´ingénierie informatique qu´elles essaient de pousser vers le conseil.

· Hébergeurs (Atos, Experian, AID, …) : les hébergeurs traditionnels ont développé un savoir-faire dans la rigueur de gestion des solutions de marketing de bases de données.

· Agences marketing direct ou interactif (OgilvyOne, Agency.com, Cythere, …) : ces agences spécialisées sur la création soit via l´Internet soit via les bases de données marketing ont développé un pôle technologique.

· Editeurs de logiciels (Oracle, Siebel, Vantive, SAS Institute, Business Objects, ...) : ils commercialisent des technologies et s´allient généralement avec des sociétés de conseil ou d´ingénierie pour la mise en œuvre de leurs produits dans le contexte particulier d´un client.

En France, le CXP (Centre français d'expérimentation des progiciels) recense aujourd'hui près de 60 logiciels d'automatisation des ventes . Dans ce recensement, la moitié compte moins de 100 références. Incontestablement, cet état de fait est la caractéristique d´un marché en maturation où les places restent à prendre.

Béatrice Roux / www.invest-valley.com
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