cheter
sur le Web ? Pas question... Je ne suis pas du genre à
laisser traîner mon nº de CB en ligne... " Cette
phrase si souvent entendue est le produit d'une vaste désinformation
sur le sujet. Le risque de se faire " pirater " son
numéro lors d'un achat en ligne approche le zéro
absolu !
Certaines
légendes ont la vie dure. Celle qui voudrait qu'il soit
dangereux d'acheter sur un site Web persiste, quand bien même
elle défie l'analyse.
Le quidam moyen a l'impression suivante. Il vient de frapper son
numéro de carte bleue pour acheter une boîte de chocolats
à 240 francs. A ce moment précis, patatras, Joe
le Hacker entre en scène. Notre flibustier des temps modernes
intercepte le message qui voyage sous la forme de paquets jusqu'à
l'ordinateur du fournisseur. Quelque chose du genre : " gcXUnd#W4gYXZpcyBl...
" Joli coup, Joe ! Il ne lui reste plus, en utilisant son
extraordinaire batterie de logiciels dénichés sur
des forums sentant le soufre, qu'à décoder les 16
chiffres qui pourront donner accès à une nouba du
consommateur : une Corvette Chevrolet, une garde robe Gucci, une
croisière vers Antigua... Adieu économies, bas de
laine, SICAVs...
Et bien désolé, mais ce scénario relève
de la science-fiction la plus imaginaire jamais inventée.
L'achat sur le Web est sans risque, si l'on s'en tient aux statistiques.
Comme bien d'autres, je le pratiquais déjà à
une époque où nous étions censé être
très mal protégés. Hmm... De quelle fragilité
parlait-on alors entre 1996 et 1998 ? Les transactions étaient
protégées par une clé numérique de
40 bits. Or, nous disait-on alors, en associant les capacités
de 250 ordinateurs, l'université de Berkeley avait réussi
à forcer une clé de 40 bits en 3 heures et demi.
Comme nous vivions dangereusement en une telle époque...
Ainsi donc, alors qu'il se pratique des dizaines de millions d'échanges
à chaque seconde sur Internet, au moment où Monsieur
C'est-un-jour-sans tapait ses 16 chiffres, pas de bol, Joe le
Hacker masqué interceptait son code. Ce type, qui habitait
bien souvent dans une chambre de bonne, allait mettre à
contribution ses 250 ordinateurs pour le décrypter. Franchement,
la probabilité d'un tel événement était
déjà un modèle de l'epsilon. Comme aujourd'hui,
les clés de chiffrement mesurent 128 bits, le zéro
absolu n'est plus très loin.
Les numéros de carte bleu qui ont pu être utilisés
illégalement sur Internet n'ont pas été obtenus
par ce biais. Certaines personnes ont pu avoir accès à
des listes de numéros et d'autres ont cru bon de les publier
ne serait ce que durant quelques heures. Les 300.000 numéros
de carte de crédit dérobés en décembre
99 sur le site de CD Universe ont certes fait de la mauvaise presse
au Web même s'il n'est pas sûr qu'ils aient pu servir
à grand chose. En attendant, le maillon faible de la chaîne
est sans aucun doute l'ordinateur du fournisseur qui pourrait
stocker de manière un peu légère lesdits
numéros de carte bleue. C'est ce qui explique que certains
fournisseurs tels que Houra préfèrent rassurer leurs
clients en indiquant clairement qu'ils ne stockent aucunement
les numéros de carte sur leurs machines. Mais les systèmes
de protection évoluent à vitesse grand V.
Franchement, si l'objectif est d'obtenir un numéro de carte
bleue, il existe des méthodes plus simples que le "
hacking " informatique. D'ailleurs, soit dit en passant,
Kevin Mitnick, le plus célèbre des hackers, a confessé
qu'il n'avait jamais été un génie de la programmation.
Son talent consistait à travestir son identité au
téléphone. Kevin n'hésitait jamais à
appeler une compagnie du téléphone, un constructeur
informatique, ou une administration et il parvenait alors à
se faire passer pour un employé du personnel d'intervention,
un technicien... Par son don inné de la tchatche, il obtenait
le plus naturellement du monde les mots de passe et pourtant,
il n'en a jamais fait d'usage frauduleux. Sans aller jusque là,
n'importe quel commerçant voit passer des centaines de
cartes chaque jour et une bonne mémoire des numéros
pourrait suffire.
Mais le plus étonnant, c'est que même si l'on prend
en compte les abus potentiels, l'utilisation d'une carte bleue
sur Internet s'avère au moins aussi sûr sinon plus
qu'un achat dans la vie courante. Admettons que Joe le Hacker
utilise illégalement le code de Monsieur C'est-un-jour-sans
sur le site d'Amazon pour acheter une édition de la Pléiade.
Et bien si Joe désire recevoir lesdits ouvrages, il sera
tout de même obligé de donner un nom et une adresse
de livraison ! Il est donc possible de repérer la trace
du fraudeur. Maintenant, lorsque Martine-la-klepto dérobe
une American Express et opère une frénésie
d'achats dans la galerie du Lido des Champs Elysées, elle
emporte les marchandises tout de suite et il peut être impossible
de retrouver sa piste. (Cela dit, même dans ce cas là,
il est possible de faire rapidement opposition et la franchise
que doivent supporter les particuliers est limitée).
Venons-en aux chiffres. Les américains ont dépensé
plus de 60 milliards de francs sur le Web à Noël 1999
et l'on s'attend à une surmultiplication de ce chiffre
pour les fêtes à venir. S'il s'avère 9 sur
10 de ces internautes ont rencontré des difficultés,
c'était au niveau du délai de livraison non respecté
ou l'indisponibilité de certains produits. Comme le relève
une enquête du magazine Futurs, le problème majeur
des livreurs consiste à passer outre les portes codées
dans les immeubles urbains. En tout cas, aux USA, 98% des clients
ayant acheté sur le Web se déclaraient satisfaits
et n'avaient qu'une envie : recommencer ! Il existe bien évidemment
quelques officines douteuses qui tentent d'utiliser ce nouveau
média pour vendre du vent. Ainsi, en juillet 1999, un dénommé
Robert Guest a écopé de 14 mois de prison ferme
pour avoir encaissé 37 000 dollars sans avoir livré
les marchandises commandées. Mais on imagine mal les grandes
enseignes se livrer à une telle pratique et les tribunaux
ont la main particulièrement lourde pour ces pionniers
là. Enfin, n'oubions pas que désormais, de nombreux
sites offrent une assurance implicite telle que Fia-net qui protège
le consommateur pour le cas, où il se ferait gruger.
A tout ceux qui n'auraient pas encore sauté le pas, avouons-le
: lors du tout premier achat sur le Web, l'on a une très
légère impression de vivre dangereusement. Le plus
simple, pour commencer, consiste à se faire livrer des
articles " bénins " tels qu'une cartouche de
jet d'encre. Comme ils le constateront, très vite, on n'y
pense plus et l'on y prend goût. Le véritable risque
serait plutôt de développer une accoutumance au plaisir
de se faire livrer à domicile ce qu'habituellement il fallait
transporter !
Daniel
Ichbiah,
Auteur
de nombreux livres qui font référence
en matière de nouvelles technologies :
"Génération MP3, la victoire de la musique"
"Bill Gates et la saga de Microsoft"
"La saga des jeux vidéo"
"Les nouveaux héros d'Internet¨ etc.
Site Web : http://www.ichbiah.com
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